« Menez-nous », voudrions-nous pouvoir
dire à M. Mæterlinck, à Mme de Noailles, « dans le jardin de Zélande où
croissent les fleurs démodées », sur la route parfumée « de trèfle et d’armoise
», et dans tous les endroits de la terre dont vous ne nous avez pas parlé dans
vos livres, mais que vous jugez aussi beaux que ceux-là. » Nous voudrions aller
voir ce champ que Millet (car les peintres nous enseignent à la façon des
poètes) nous montre dans son Printemps, nous voudrions que M. Claude Monet nous
conduisît à Giverny, au bord de la Seine, à ce coude de la rivière qu’il nous
laisse à peine distinguer à travers la brume du matin. Or, en réalité, ce sont
de simples hasards de relations ou de parenté, qui, en leur donnant l’occasion
de passer ou de séjourner auprès d’eux, ont fait choisir pour les peindre à Mme
de Noailles, à Mæterlinck, à Millet, à Claude Monet, cette route, ce jardin, ce
champ, ce coude de rivière, plutôt que tels autres. Ce qui nous les fait
paraître autres et plus beaux que le reste du monde, c’est qu’ils portent sur
eux comme un reflet insaisissable l’impression qu’ils ont donnée au génie, et
que nous verrions errer aussi singulière et aussi despotique sur la face
indifférente et soumise de tous les pays qu’il aurait peints.
Keine Kommentare:
Kommentar veröffentlichen