Tant que la lecture est pour nous
l’initiatrice dont les clefs magiques nous ouvrent au fond de nous-mêmes la
porte des demeures où nous n’aurions pas su pénétrer, son rôle dans notre vie
est salutaire. Il devient dangereux au contraire quand, au lieu de nous
éveiller à la vie personnelle de l’esprit, la lecture tend à se substituer à
elle, quand la vérité ne nous apparaît plus comme un idéal que nous ne pouvons
réaliser que par le progrès intime de notre pensée et par l'effort de notre
cœur, mais comme une chose matérielle, déposée entre les feuillets des livres
comme un miel tout préparé par les autres et que nous n’avons qu’à prendre la
peine d’atteindre sur les rayons des bibliothèques et de déguster ensuite
passivement dans un parfait repos de corps et d’esprit. Parfois même, dans
certains cas un peu exceptionnels, et d’ailleurs, nous le verrons, moins
dangereux, la vérité, conçue comme extérieure encore, est lointaine, cachée
dans un lieu d’accès difficile. C’est alors quelque document secret, quelque
correspondance inédite, des mémoires qui peuvent jeter sur certains caractères
un jour inattendu, et dont il est difficile d’avoir communication.
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